Interview de Cindy Rajaona, professeure de danse à l’initiative de la mise en place de cours d’éducation artistique et culturelle à l’école de Yakaar.

Pourquoi cette idée d’un atelier rythmique pour les élèves de Yakaar ?

« L’ enfant sourd qui expérimente le rapport musical, ouvre une porte pour s’ancrer dans le quotidien de sa famille et de sa communauté. Danse, musicalité et humanité sont intrinsèquement liées. L’être humain danse et chante tout le temps d’autant plus sur le continent africain ! En tant que professeure de danse, j’observe au quotidien que ce sont de formidables leviers d’expression, d’épanouissement et de communication. Proposer aux élèves de l’école cette possibilité d’éloquence, de bien-être et d’ouverture au monde était pour moi une évidence. »

Et cet atelier rythmique, il s’est mis en place comment ?

« Pour rendre cela réalisable j’ai d’abord suivi une formation spécifique en pédagogie danse & handicap. Puis au cours de la semaine de mission de 2021, avec l’aide d’un musicien percussionniste, nous avons commencé par initier les élèves à la relation musicale.

J’ai opté pour la percussion pour différentes raisons. Cet instrument émet de fortes vibrations, il est l’un des plus facile à appréhender et on le trouve facilement au Sénégal ! La réussite de l’atelier était lisible sur le visage des enfants. Alors l’idée a germé dans l’esprit de tous… »

Concrètement, comment s’intègre-t-il au programme scolaire ?

« Insérer l’art dans le programme éducatif, c’est agrémenter le cursus par des projets envisageant des méthodes pédagogiques actives et favorisant l’acquisition de compétences transversales. C’est aussi, permettre à ces petits êtres de s’ouvrir au monde et à sa diversité. La curiosité culturelle et l’intérêt pour toutes les formes d’art doivent être encouragés auprès de ces élèves en situation de handicap.

C’est ainsi que l’association en concertation avec l’équipe pédagogique de l’école a décidé d’ajouter un cours de rythmique au programme et de recruter le fameux musicien ! Il a la responsabilité d’assurer un atelier tous les vendredis matins dans la classe de CP/CE1.

Nous avons équipé l’école de Djembés et depuis 2022, les élèves apprennent à en jouer. Ils expérimentent le travail de l’unisson, de l’harmonie, du rythme et la réaction de leur corps aux sensations musicales. »

SPECTACLE DE L’ÉCOLE 2022 : YAK’ART

Parlez-nous du projet Yak’Art. C’est quoi ?

« Yak’Art : c’est un jeu de mot avec le nom de l’école. Il s’avère être une très jolie appellation pour le projet de développement d’un volet artistique auprès des élèves. Le thème suivant a été choisi : Nit nitey garabam – en Wollof (L’ Homme est le remède de l’Homme). »

Musique et danse font partie du spectacle vivant, les enfants sont-ils amenés à se produire en public ?

« L’ un des objectifs du projet de rythmique était de pouvoir les amener à se produire en spectacle et d’avoir ainsi l’occasion de susciter la fierté de leur famille et d’un public. L’ idée sous-jacente étant d’offrir à ses enfants la possibilité d’être une personne intégrée tout en devenant un modèle pour les autres. C’est ainsi que lors de cette mission 2022, les élèves ont présenté leur 1er spectacle. 

Cette année là je n’étais pas la seule missionnaire à intervenir sur l’atelier. J’ai eu le plaisir de travailler avec Dominique Fidanza, artiste complète aux multiples facettes dont celle du Chant Signe*.

Dominique a initié les élèves au Chant Signe en leur apprenant un refrain musical. Quant à moi, je leur ai enseigné une chorégraphie. Puis nous avons mis en commun les deux parties pour créer une mini pièce.


La représentation a eu lieu à l’issue de la semaine de travail devant un public composé des familles des enfants, des membres de Yakaar et d’APROSEM, ainsi que de toute l’équipe des missionnaires HMB. Ce fût très émouvant de les voir si investis et en retour de voir le regard plein d’admiration de leurs familles. »

La suite, c’est quoi ?

« Poursuivre cet enseignement artistique, l’enrichir et le développer pour cultiver des esprits vifs et sensibles. Le faire évoluer en diversifiant les domaines artistiques; peut-être en organisant des échanges artistiques avec d’autres structures… Les possibilités sont grandes. D’ailleurs, n’hésitez pas à nous donner vos idées. »